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ma laine que l'ouvrage n'a pas dû retarder." Pas de réponse. Ne voyant personne, Fesse-ben dit: "Eh ben! je vas le rapporter sur mon dos, le moulin à carder. Ça sera plus commode pour l'année prochaine." Prend la Bête-à-renifler et se la met sur le dos Il était fort, cet animal! bien plus fort que moi! Fesse-ben n'est pas encore arrivé à sept lieues de chez son maître que le château du roi veut se défaire. Ça n'en fait, un vent! Le château veut partir. Le roi envoie du monde dire à Fesse-ben: "Lâchez donc cette bête-là, au nom de monsieur le roi!" Fesse-ben répond: "Ça ne presse pas; c'est le moulin à carder que je rapporte pour qu'il ne soit pas aussi loin, l'année prochaine. C'est pour ça que je le rapproche." - "Lâche ça, lâche ça! disent les gens; ne viens pas plus près: le château du roi veut se briser!" Lâchant la bête à terre, Fesse-ben s'en va trouver le roi. "Cou'don, dit le roi, en voilà des jeux pour faire briser mon château!" "Quels jeux ?"-"Oui, tu rapportais la Bête-à-renifler, et mon château voulait se défaire, tellement elle reniflait." Fesseben répond: "Savez-vous ce qu'elle a fait? Elle a reniflé mon tapon de laine. Il me fallait donc rapporter la bête pour avoir la laine." "C'est bon, c'est bon! dit le roi, va de suite la reporter où tu l'as prise, cette 'affaire-là.' 1 Ça renifle tellement que mon château en craque su tous les sens."

Ce n'est pas tout. Comme le roi partait en guerre contre un pays voisin, il dit, le lendemain: "Fesse-ben, tu vas aller à ma place porter le pavillon, à la tête de mon armée.". "Monsieur le roi, si vous m'envoyez à votre place, tâchez de me donner un vieux cheval; je ne veux pas être trop bien grèyé de chevaux." En partant pour la bataille, le roi veut lui donner une carabine. "Le roi, je n'ai pas besoin de ça," répond Fesse-ben. Et le vlon 2 parti pour aller à la rencontre de l'ennemi. Quand il en approche, il prend son cheval par la queue, et, se lançant dans les rangs de l'armée ennemie, pan, pan! son cheval à la main, il frappe de tous côtés, et il tue tous les ennemis à noir.'3 Quand il n'en reste plus qu'une couple, des fuyards, il se regarde dans les mains: "Ah! il dit, il ne me reste plus que la queue de mon vieux cheval: le reste est tout usé! Quant à ces deux-là? Je les laisse aller." La guerre finit d'en par là. Fesse-ben rapporte le pavillon d'honneur. Le voyant revenir, le roi n'est pas rougeaud,'' et il se dit: "S'il faut qu'il reste ici jusqu'à la fin et me donne une claque au derrière, m'a prendre le bord." "

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Il lui vient à l'idée d'envoyer Fesse-ben à un endroit dangereux, dont il a entendu parler; c'est à une bâtisse remplie d'or et d'argent, et

1 1 I.e., chose-là, c'est-à-dire la bête.

2 Voilà.

4 La victoire.

I.e., sans exception.

↳ 'Rassuré,' i.e., il est saisi de frayeur.

• Dans le sens de "c'en est fini de moi;" expression souvent usitée parmi les paysans.

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gardée tout le tour par des renforts, et ben grèyée de canons. nant deux poches à Fesse-ben, le roi dit: "Va me chercher une pochetée d'or et une pochetée d'argent à la bâtisse aux renforts. En y entrant tu donneras cette lettre au premier." Fesse-ben prend la lettre et part à pied pour chercher une pochetée d'or et une pochetée d'argent. Avant de le laisser entrer on lui demande quelle affaire On il a. Il remet la lettre, où le roi a écrit: "Tuez-le au plus vite!" lui ferme la porte au nez. Voilà le canon et les fusils qui tirent sur lui. Les balles et les boulets lui glissent sur le ventre en s'aplatissant il avait la peau du ventre dure comme [celle d'une] puce. 2 Il crie: "Tenez-vous tranquilles, mes polissons! Je n'aime pas qu'on me lance des pois, moi," Le chef dit à ses hommes: "Ayé! Tirez, et tuez-le! le roi le demande." Les balles sifflent et lui pètent dans le visage et partout; mais ce monsieur a la peau dure, certain! Il brise la porte avec son genou, entre, prend une pochetée d'or et une pochetée d'argent, et il revient les donner au roi. Le voyant arriver, le roi se dit: "Mais, comment ça se fait, ils ne l'ont toujours pas tué ?"

Il n'y a plus que deux jours avant que l'année soit finie. C'est pourquoi le roi n'a pas grand'façon, et il évente, se demandant quoi faire.

Le bout de l'année arrivé, Fesse-ben dit au roi: "Monsieur le roi, il y a un an à matin qu'on a passé un marché." Le roi répond: "Si tu aimes mieux, Fesse-ben, m'a te donner la pochetée d'or et la pochetée d'argent plutôt que de me laisser donner une claque au derrière." -"Ah, monsieur le roi! pour une 'parole de roi!' je ne trouve pas que Tout vous teniez beaucoup à votre honneur."-"J'aime mieux..." en parlant, il se retourne vers la porte, où un quêteux s'adonne à rentrer. "Bon quêteux, comment c'que tu demandes pour te laisser donner une claque au derrière par cet homme ?" - "Donnez-moi trente sous; ça sera assez." Le roi dit: "Ah, je vas vous donner cinq piastres."-"Monsieur le roi, vous êtes ben charitable!" Au quêteux Fesse-ben dit: "Venez, monsieur le quêteux, si vous êtes prêt. Mon temps ici est fini, et je vas vous donner ça de suite, avant de partir." Pendant qu'il emmène le quêteux sur la galerie, le roi et la reine s'en vont regarder à la fenêtre. "Etes-vous prêt?" demande Fesse-ben. Le quêteur répond: "Oui." Fesse-ben ajoute: "Pliezvous un peu en vous mettant les mains sur les genoux, pour me donner une chance." Fesse-ben lui 'pousse une claque au' derrière, et voilà le quêteur parti à monter dans les airs, si loin qu'on l'a perdu de vue. Est-il revenu? Je ne le sais pas. L'avez-vous revu, vous autres? Moi qui suis resté ici, je ne l'ai jamais rencontré depuis.

1 Chef, maître.

Thiboutot disait "dur comme une puce."

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Une fois, il est bon de vous dire, c'était un vieux et une vieille, des bûcherons qui avaient trois petites filles.

Avant de partir pour la forêt, le bûcheron dit: "Ma femme, tu enverras une des petites filles me porter à dîner, à midi." La mère envoie donc la plus grande des petites filles porter à dîner à son père.

En s'en allant, le long du chemin, l'enfant se met à jouer avec des fleurs et s'éloigne du sentier. Elle s'écarte et, en cherchant son chemin, elle arrive à une petite maison où vit un vieillard dont la grande barbe blanche traîne quasiment à terre. Comme la nuit est proche, la petite fille demande: "Grand-père, je pourrais-t'i avoir à loger ici, à soir?" "Oui, ma petite fille. Mais aujourd'hui, j'ai oublié de donner à dîner au petit coq, à la petite poule et à la vache. gner pour moi, et demande-leur si tu peux coucher ici." leur donner à manger, la petite fille oublie de le faire; et quand elle leur demande: "Je peux-t'i avoir à loger ici, à soir?" ils répondent: "Non!" et tous trois ils disent: "Puisque tu as oublié de nous donner à manger, nous allons te mettre dans les basses-fosses, à la cave." C'est ce qu'ils font.

Va les soiPartie pour

Quand le vieux bûcheron revient chez lui, le soir, il dit: "Ma femme, tu ne m'as pas envoyé à dîner, aujourd'hui, et j'ai eu à m'en passer." "Mais oui! j'ai envoyé notre petite fille. Elle ne s'est donc pas rendue à toi?" "Non, je ne l'ai pas vue." "C'est une

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chose bien curieuse!"

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Avant de repartir pour bûcher, le lendemain, le bûcheron dit: "Envoie-moi une petite fille avec mon dîner, à midi."

La deuxième des petites filles s'en va porter à manger à son père. Mais, elle aussi s'écarte en jouant avec des fleurs, le long du chemin. En marchant, elle arrive à la petite maison du vieillard à la longue barbe, elle entre, et elle voit le vieillard assis sur une chaise. "Monsieur, je pourrais-t'i avoir à loger, ici ?" — "Oui, ma petite fille. Mais n'oublie pas d'aller donner à dîner à la petite poule, au petit coq et à la vache." Malgré sa promesse, la petite fille l'oublie comme sa sœur, et quand, le soir, elle va leur demander: "Est-ce que je pourrais coucher ici?" le petit coq et la petite poule répondent: "Puisque tu as oublié de nous donner à dîner, tu ne pourras pas coucher ici. Mais tu vas aller rejoindre ta sœur, dans les basses-fosses, à la cave."

En revenant à la maison, le soir, le bûcheron dit: "Ma femme, tu ne m'as pas envoyé porter à dîner, aujourd'hui ?" "Mais oui; j'ai

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1 Recueilli à Sainte-Anne, Kamouraska, en août, 1915. Conteur, Achille Fournier, qui a récemment appris ce conte d'un Canadien de la rive nord du Saint-Laurent. Le texte de Fournier, dans cette formule est habituellement: "Une fois, c'était bon de vous dire, c'était un vieux et une vieille..."

envoyé la seconde de nos petites filles." Le père dit: "Cette pauvre enfant, elle a dû s'écarter, je cré ben."

Le lendemain, le bûcheron part encore pour la forêt en disant: "Aujourd'hui, ne manque pas de m'envoyer porter à dîner par la dernière de nos petites filles."

La mère envoie donc sa dernière petite fille. Tout se passe de la même manière; l'enfant s'écarte en jouant avec des fleurs, et elle arrive chez le même vieillard. "Je pourrais-t'i avoir à loger ici, à soir?" demande-t-elle. Le vieillard dit: "Oui, mais n'oublie pas de soigner mon coq, ma poule et ma vache." A midi, l'enfant demande: "Où avez-vous mis le grain pour soigner les animaux ?" Quand le vieillard lui a donné le grain, elle s'en va soigner le petit coq, la petite poule et la vache.

Le soir, elle demande à coucher au petit coq et à la petite poule, qui répondent: "Va coucher dans cette chambre, là." Elle va donc y coucher.

Durant la nuit, elle entend un train épouvantable. En se réveillant, elle pense: "Dis-moi donc ce qui se passe ici ? J'ai peur!" Le train cesse, et elle s'endort.

Quand elle se réveille, le lendemain matin, elle se trouve dans un beau château, le plus beau des châteaux. Le vieillard à grand'barbe? C'était un beau prince métamorphosé, qui, revenu à lui, dit: “Tiens, ma petite fille, c'est toi qui m'a délivré. J'étais amorphosé, mais je suis revenue parce que tu n'as pas oublié comme les autres de donner à manger à mon petit coq, à ma petite poule et à ma vache. A'ct'heure, va à la cave chercher tes deux petites sœurs." A la cave, la petite fille retrouve ses deux sœurs, qu'elle ramène avec elle. Le beau prince lui dit: "C'est toi qui m'a délivré, moi et mon château. Il faut donc s'épouser." Il l'amène visiter son château, le plus beau des châteaux, tout grèyé en or et en argent; et il lui dit: "Ma belle petite fille, tout ça t'appartient."

Ils se sont donc mariés et ils ont toujours vécu heureux. Et moi ils m'ont envoyé vous le raconter. 2

61. LE PETIT TEIGNEUX. 3

Une fois, il est bon de vous dire, c'était un vieux et une vieille qui restaient dans un bois. Quand ils firent l'achat' d'un petit garçon, ils l'appelèrent Petit-Jean.

1

1 Fournier dit "dans ce château," bien que, plus haut, il ait dit "petite maison." 2 Il est évident que cette version est très abregée. La raison en est sans doute que Fournier, suivant son propre aveu, ne peut plus aujourd'hui retenir un conte aussi facilement que dans son enfance.

Recueilli à Sainte-Anne, Kamouraska, en juillet, 1915. Conteur, Georges-S. Pelletier.

Petit-Jean commence à grandir. Comme il grandit pas mal vite, il se trouve joliment grand quand, un jour, son père meurt.

Restant seule dans la forêt, la vieille et son petit garçon sont tellement pauvres qu'ils ne vivent que de racines et d'herbages.

Petit-Jean, un bon matin, dit à sa mère: "Il faut que je parte.” Ayant mis le petit habillement que sa mère lui grèye, il part et file dans la forêt.

Après avoir marché une couple de jours, qu'est-ce qu'il rencontre ? Une bonne vieille fée. "Dis-moi donc où c'que tu vas, mon petit ver de terre?" - "Parlez m'en pas! je suis parti de chez nous pour m'engager, afin de gagner ma vie et celle de ma mère." - "Puisque c'est de même, je vas te laisser passer. Mais, jamais je ne laisse passer personne dans cette forêt." Quand Petit-Jean s'éloigne, la fée le rappelle et lui donne une petite canne de souhaite-vertu1 en disant: "Tout ce que tu souhaiteras avec cette petite canne sera accordé." Avec sa canne, Petit-Jean prend la forêt et file.

2

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Pas loin de là, ce qu'il aperçoit ? Un grand trou sans fond. S'en approchant, il se penche au-dessus et se met à regarder. "Eh misère! il se dit, ça m'a l'air ben creux! Si j'allais voir au fond, je me demande ce que j'y trouverais." Avec sa petite canne à souhaite-vertu il se souhaite dans le fond du trou. Dans un 'rien de temps,' le voilà rendu. Rendu, il se trouve en plein milieu d'un beau 'chemin du roi,' conduisant à un château sur une montagne. Prenant le montage, il monte, monte, et arrive au château le plus beau du monde, en or qui reluit au soleil. Mais, on n'y voit personne. Aussitôt entré, Petit-Jean commence à tout visiter, une salle après l'autre. Dans une salle, il voit sept chaises rangées alentour. Il s'assied sur une chaise. Après une escousse, il entend un train 'de sorcier.' Qu'est-ce qui arrive? Sept géants qui descendent aussi vite que ça 'peut porter.'5 Voilà Petit-Jean qui se fourre sous une chaise, pendant que les géants entrent, se saprent le derrière sur leurs chaises et se mettent à jaser de leur journée et de tout ce qu'ils ont fait. Sous la chaise, où il entend tout, Petit-Jean a si peur qu'il tremble comme une feuille [au vent], et il jongle, pour savoir comment sortir de là. Tout à coup un géant lâche un gros pet. Ti-Jean sort à la course de sous la chaise, et dit: "Bonjour, poupa!" en lui donnant la main. Le géant répond: "Dis-moi donc, mon petit ver de terre, comment tu es venu sous ma chaise ?" "Mais, poupa! c'est vous qui m'avez envoyé dans ce monde icite. Misère! comment voulez-vous que j'y arrive autrement?"

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