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Nou, Péon, Touchette, Talotte, Vote, Tou, Trol, Corteil, Sontè, Ménoche, et ainsi de suite.

Les sobriquets de famille sont quelquefois dérivés du nom ou du sobriquet d'un parent en ligne ascendante. Par exemple: Sévère-àTrol, Thadore-à-Trol, où Sévère et Théodore sont les fils de Trol (Poulin); le Blanc-à-Thadore-à-Trol, où le Blanc est le petit-fils de Trol; Charles-à-France-à-Lambert, où Charles est le petit-fils de Lambert (Morin). D'autres fois, ils sont adoptés pour caractériser un groupe tout entier, soit d'apparentés, soit de régionaux; ainsi : les Saint-en-peine, les Sans-souci, les Avocats, les Craquées, les Chiensde-mer, les Marin, les Bat-le-diable, les Rat-musqués, les Beignets, les Têtes-d'anguille.

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Certains sobriquets sont péjoratifs ou, tout simplement, subis avec impatience par leur possesseur; tels sont les surnoms suivants: les Pince-farine, les Badouche, le Bom'-la-Pétusse, Guerlot, et ainsi de suite. La plupart des sobriquets n'étaient, toutefois, pas offensants. Ils servaient ou servent encore fort à propos à distinguer les rameaux de familles nombreuses, où les noms personnels n'auraient pas suffi. Leur usage était tellement habituel, dans certains cas, que le souvenir du nom de famille documentaire était sur le point de perdre. L'explication que l'on donne de l'origine de ces noms est purement étiologique, c'est-à-dire inventée après le fait. On ne doit donc pas s'attendre à ce qu'elle comporte nécessairement une vérité historique. Ainsi, on dit que les Rat-musqué (Pelletier) sont ainsi dénommés parce qu'ils vivent habituellement sur la Grande-rivière, à Sainte-Annedes-Monts (Gaspé); telle n'en est toutefois pas la raison, puisque la famille souche, à Kamouraska, porte le même surnom, depuis un temps immémorial.

Il y en a, parmi ces sobriquets, qui doivent être fort anciens, surtout quand le sens en est perdu. Deux exemples suffiront: le surnom de Cayen (probablement dérivé d'Acadien") a une diffusion considérable au Canada; il est celui que les Canadiens de Québec donnent aux Acadiens des Provinces-maritimes; il est aussi celui de trois familles distinctes de la Beauce: celles de Thibodeau, de Létourneau (Saint-François), et de Hébert (Sainte-Marie); à Sainte-Anne-desMonts (Gaspé), la famille de Pierre Derouet (?) le portait aussi; ailleurs encore on connaît ce sobriquet de famille. Le sobriquet de Péquion, entr'autres, semble être d'un âge respectable. Peut-être dérivé du même nom qui, chez les Bretons-nous parlons ici de mémoire seulement désigne une sorte de fée, il est connu à SainteAnne-des-Monts (Gaspé): "le père Piquion Dugas;" et à la Beauce: les Péquion (Quirion, et Poulin); il nous semble aussi avoir lu le même nom dans un recueil du nord-est de la France ou de la Flandre.

Pour ce qui est de la géographie populaire, les listes qui suivent VOL. 33. NO. 130.—24.

suggèreront aux lecteurs de Québec une foule de souvenirs analogues se rapportant à leur milieu. Sous la surface monotone de la nomenclature officielle et épiscopale de la géographie de Québec, qui n'embrasse guère que des noms de saints et des noms adventices,1 il se trouve une foule de vocables obscurs, mais pittoresquse et intéressants, tirés de l'imagination populaire, qui n'eurent pas, le plus souvent, la prétention d'être ennoblis. Les districts qui se sont développés à l'écart de la tutelle ecclésiastique ou industrielle sont particulièrement riches à cet égard. Notre liste pour le comté de Gaspé en fera foi. Même dans les villages ou les 'paroisses' plus rapprochées, nombre de termes descriptifs indiquent aux habitués les particularités géographiques de leur milieu. Ainsi, dans un rayon de moins d'un mille de la maison paternelle, à Sainte-Marie (Beauce), nous connaissions tous exactement les endroits désignés sous les noms suivants: les Fonds, l'Ecart, la Batture-chez-Mias, le Remous, la Batture-chez-Carter, la Grosse-roche, le Rapide-chez-Binet, la Butte, le Côteau, la Prairie, le Platin, le Ruisseau, la Savane, le Bocage, la Mollière, la Sucrerie. . . .

Les noms populaires de lieu que nous avons remarqués sont, les uns, descriptifs ou caractéristiques (L'Echouerie, La Tourelle, les Rapides-du-diable, la Côte-de-la-misère, le Pis-sec, le Temps-perdu); les autres, dérivés d'un nom de personne ou d'objet, ou d'un sobriquet, quelquefois aussi d'un nom sauvage (l'Anse-au-Griffon, la RivièreGilbert, le Rang-des-Blayes, Tortigou, les Chikchocs); d'autres viennent d'une légende, d'une croyance ou d'une anecdote populaires (l'Ansepleureuse, le Rocher-malin, la Coulée-du-gelé, la Vieille).

Nous n'attachons guère d'importance aux généalogies populaires incorporées dans notre article uniquement à titre d'exemples. Nos recherches sur ce point ont été trop hâtives et incomplètes. La liste se rapportant à Sainte-Anne-des-Monts (Gaspé) démontrera, toutefois, combien est complexe l'origine des colons qui ont fondé ce groupement gaspésien. Les historiens et les généalogistes pourront se rendre compte de l'utilité de la tradition orale, dans certaines parties de la documentation qui leur est indispensable. Aux traditionnistes et aux ethnographes, les renseignements obtenus indiqueront combien il est important de se renseigner sur les origines de ceux que l'on consulte et sur la source des traditions qu'ils rapportent. Grâce à nos questions systématiquement posées, nous avons appris que telles chansons, tels contes ou telles légendes recueillis, par exemple, à Gaspé, remontent soit à Rimouski, à Kamouraska, à l'Ile-d'Orléans ou à quelque autre endroit désigné; ce qui est un acheminement vers la connaissance des origines plus éloignées.

1 Un critique a parlé de “notre martyrologe géographique;" les visiteurs étrangers sont d'ailleurs souvent portés à la moquerie devant cette litanie interminable de saints qui s'échelonnent le long des lignes de chemin de fer. Lesmêmes noms se répètent d'ailleurs indépendamment dans les différents évêchés de la province.

Tout lecteur du Canada, qui s'intéresse à ces études détaillées du blason et de la géographie populaires de son district, est instamment prié de les recueillir et de nous les communiquer, à titre de collaborateur. Nous espérons ainsi, par enquête directe ou indirecte, recouvrer pour l'histoire une partie de ces notions populaires qui, autrement, seraient bintôt perdues pour la postérité.

A) SAINT-FRANÇOIS (BEAUCE).

La 'paroisse' de Saint-François est située sur la rivière Chaudière, à cinquante milles au sud de Québec. Certaines indications nous portent à croire que sa population, dont nous n'avons pas étudié l'origine lointaine, forme un groupe ethnique quelque peu distinct de ceux qui l'environnent. La phonétique, les noms de famille, la mentalité y ont une individualité marquée, dont les confins géographiques, d'ailleurs restreints, nous sont encore vagues. Les commencements de cette petite colonie constituée de familles probablement venues des environs de Québec remontent à moins de deux siècles.

C'est de Charles Barbeau (domicilié à Sainte-Marie, Beauce; originaire de Saint-François, et âgé de 75 ans, en 1919) et de Mlle Ouilyémine1 ou Olyémine Carrier (aussi de Sainte-Marie, originaire de Mégantic, et âgée de près de 60 ans) que nous viennent les données incomplètes qui se rapportent à la géographie, aux origines et aux sobriquets de Saint-François. De fréquentes visites, depuis notre enfance, nous ont à nous-même permis de constater quelques-sunes deschoses dont nous parlons, ici.

Désignations géographiques populaires.

La Concession de Saint-en-peine, ainsi nommée, dit-on "parce que le monde [y] est pauvre, a l'air en peine;" "c'est un nom de moquerie" dont on se sert couramment: les Saint-en-peine. “Dans ce rang, cinq filles avaient eu des enfants, dans un été," il y a plus de cinquante ans:

-le Village des Papes, au Rocher, quelques milles en bas du village; sur la rive est. Les Papes, sobriquet de famille des Giroux;

-le Village des Punaises, au-dessus des Rapides-du-diable, à quelques milles plus haut que le village, sur la rive est. L'origine de ce nom vient, dit-on, du fait que, lors de la découverte des gisements d'or, à la rivière Gilbert, il y a plus de cinquante ans, un Augustin Pomerleau, forgeron, avait fait transporter à cet endroit une vieille bâtisse "toute remplie de punaises." Ce village devint considérable, "au temps des mines. Depuis, il a diminué à rien;"

- la rivière Gilbert, en haut des Rapides, où se trouvent des gisements d'or;

1 Corruption de Wilhelmine.

-les Rapides-du-diable, sur la rivière Chaudière, entre SaintFrançois et Saint-Georges;

―le Bassin, en bas des Rapides;

--

la rivière Famine, à un mille en bas de l'église de Saint-Georges, sur la rive est;

-la rivière Flamand, se jetant dans la Famine, en pleine forêt; - la rivière du Loup;

les Rapides-Martin, au haut de Saint-Georges;

- la rivière du Moulin, en haut du village de Saint-François, sur la rive ouest;

le ruisseau de Meules, qui se jette dans la rivière du Moulin;

- le Bras ou la rivière du Bras, entre Saint-François et Saint-Joseph, sur la rive ouest;

- du côté opposé, la rivière des Plantes; le propriétaire de terrains avoisinants s'appelait Plante;

-plus haut, le ruisseau de Bartrand, au village, sur la rive est. Un sentier, longeant ce ruisseau, conduisait aux "concessions." "Les filles, qui venaient à la messe, le dimanche, se mettaient des 'souliers sauvages' pour descendre le long du ruisseau de Bertrand. [Rendues] près du village, elles se déchaussaient, mettaient des bas et des souliers fins; elles cachaient leurs 'souliers sauvages' là; et elles se rendaient à l'église."

Origines, d'après la mémoire populaire.

Les plus anciennes familles de Saint-François portent les noms de Poulin, Bolduc, Rodrigue, Mathieu, Veilleux, Bernard, Busque,1 Doyon et Bourque. Elles sont aussi, à part des trois dernières, les plus ramifiées et le plus nombreuses.2

Sont venus, plus récemment, se fixer à Saint-François:

les Rainville; deux chefs de familles, "qui se sont établis sur des terres;" originaires du district de Montréal;

-les Saintonge; trois frères qui, après avoir vécu longtemps à la Beauce, en sont repartis;

- un nommé Coupal, de Montréal;

trois McDonald (Archie, Sam et Rory), venus du "HautCanada," mariés à des Canadiennes-françaises, et établis à la "rivière Gilbert;"

- le notaire Bélanger, originaire de Saint-Joseph (Beauce);

le docteur Gravel, venu de Sherbrooke (Qué.);

- le docteur Lafleur, originaire de la Côte-de-Beaupré (Qué.);

- le docteur Warren, Bob et son frère Thomas, venus d'Irlande, il y a plus de 70 ans;

1 Les Busque resident surtout à Saint-Georges (Beauce).

C. Barbeau ajoutait: "C'était autrefois la coutume du père d'établir ses enfants dans les environs, près de lui. C'est pour ça que les premiers qui ont ouvert cette partie du pays se sont peuplés d'advantage."

les de Léry, la famille seigneuriale;1

- les Barbeau, bien que depuis longtemps fixés à la Beauce, semblent y être arrivés plus récemment que certains autres; le père et le grandpère de notre informateur étaient nés "au Rocher," à la "rivière Calway" (Saint-Joseph, Beauce).

d'autres familles étrangères se sont de bonne heure établies à Saint-François, pour en repartir plus tard.

Blason populaire personnel.

Comme à peu près partout ailleurs, au Canada, il y avait des sobriquets de famille et des sobriquets individuels. Ces noms n'étaient pas d'ordinaire péjoratifs et ils remplacaient couramment les noms écrits. Mlle Carrier, notre informatrice, disait: "Anciennement, quand ils se parlaient les uns [aux] autres, il n'employaient jamais [leur] nom de famille." Même il fallait quelquefois un moment de réflexion pour se le rappeler.2 Etant devenues nombreuses, certaines tendaient à se ramifier en branches portant des sobriquets différents. Avec le temps, ces désignations se seraient graduellement substituées aux noms anciens qui tombaient en désuétude.

Les sobriquets s'appliquant collectivement aux membres d'une famille, à Saint-François, sont:

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-Sans-souci (Bureau; "l'arrière-grand-père se nommait Louison; Djo, Magloire, Firin” 4);

1 Il est possible que notre informateur ait ici été dans l'erreur; cela peut venir du fait que cette famille aristocratique se mêlait guère aux autres et n'était pas aussi étroitement fixée au sol.

2 C. Barbeau allait jusqu'à dire: "Il y en a dont le nom de famille n'était pas généralement connu."

Il y avait, en outre, une famille dont le vrai nom de famille était Cayen (Pierre et Olivier).

4 Pour Zéphirin. Ces Sans-souci allèrent plus tard demeurer à Lambton (Mégantic).

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