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produirait toute nouvelle atteinte portée par la marine allemande à la vie d'un citoyen des Etats-Unis. Dans la dernière phrase du document, son attitude n'est pas moins vigoureuse, où il déclare que la répétition par les commandants des navires allemands d'actes contraires aux droits des neutres "devra être considérée par les Etats-Unis, pour peu qu'ils affectent les citoyens américains comme délibérément inamicale."

La situation se présentait donc à cette époque avec un certain caractère de gravité et hardi aurait été celui qui aurait osé diagnostiquer l'issue de ces longs pourparlers.

On pouvait, jusqu'à un certain point, nourrir un vague espoir de voir l'Allemagne, désavouée par la plus grande partie des Etats neutres, souscrire aux injonctions loyales de l'Amérique, mais, soit mépris, soit infatuation et confiance dans ses forces, elle s'est toujours gardée de reconnaître ses torts. Loin de faire acte de chevalerie, elle a eu un de ces gestes caractéristiques de la mentalité allemande en apposant l'insigne des braves sur la poitrine du commandant du sous-marin qui a coulé la Lusitania: n'est-ce pas une bravade lancée à la face des protestataires et la reconnaissance implicite de l'aveu de ses procédés de guerre maritime!

Les attentats, il est vrai, ont diminué dans de très fortes proportions et, à examiner les choses froidement et sans parti pris on ne peut s'empêcher de constater que les résultats stratégiques obtenus par l'emploi de ses terribles sous-marins ont été, au fond, plutôt médiocres. Le but n'a pas été atteint et n'est pas près de l'être. Ils visaient à l'isolement des côtes anglaises et de celles du Nord de la France: ils voulaient notamment empêcher le ravitaillement de l'Angleterre de se faire par les pays neutres, et les statistiques d'entrée et de sortie des navires marchands neutres dans les ports anglais et français démontrent surabondamment que le commerce international des Alliés n'a pas été atteint dans ses artères.

Comment justifier, dans ces conditions, les actes de piraterie qui ont passé sous nos yeux? On ne saurait y voir un système loyal d'offensive conforme au droit international. Faut-il penser que les Allemands n'ont eu d'autre but que d'effrayer tout le monde par de terribles menaces? Les faits semblent donner créance à cette opinion. Elle serait en tous cas conforme à la confession que faisait en février 1915, l'amiral Kirchoff dans le Hamburger Fremdenblatt. Suivant lui, l'Allemagne n'avait pas un matériel suffisant pour maintenir le blocus et le but de son action était de "porter les sentiments d'inquiétude et d'insécurité au plus haut degré, de façon à ce que les nerfs des ennemis ne puissent supporter davantage une lutte prolongée."

Cette explication nous plaît: elle est tout allemande et rentre bien dans la théorie du terrorisme qui se rencontre, sur terre et sur mer, dans les actes de l'armée et de la marine allemandes.

En toute éventualité, ce n'est pas s'avancer trop que d'affirmer que ce n'est pas par considération pour la légitimité des revendications des neutres que le torpillage en mer s'est ralenti. Il faut en chercher plutôt la cause dans la tenacité de l'esprit d'initiative des Alliés qui ont su trouver des moyens de conjurer de nouveaux sinistres, en détruisant les sous-marins ennemis.

Cela ne veut pas dire que les Allemands aient renoncé à leur méthode: s'il en était ainsi, ils auraient depuis longtemps satisfait aux injonctions américaines; leur gouvernement aurait désavoué l'attentat de la Lusitania au lieu d'offrir de simples compensations pécuniaires pour la perte des vies américaines. Il ne l'a pas fait; il ne le fera jamais parce que son suffisant orgueil l'empêchera de faire la moindre concession sur ce terrain. Et la preuve qu'il n'a pas abandonné ses méthodes, ne la trouvons-nous pas dans la récente

catastrophe de l'Ancona, bateau de commerce italien qui a été détruit dans les mêmes circonstances que la Lusitania, non loin des côtes tunisiennes. Il transportait 500 émigrants, dont 420 ont pu être sauvés, grâce à l'arrivée de navires de secours envoyés de Bizerte. L'affaire de l'Ancona a ceci de commun avec la Lusitania, qu'il a été torpillé sans avis, mais elle offre cette odieuse particularité que des coups de canon ont été tirés, après la disparition du navire lui-même, sur les chaloupes de sauvetage! Dans ce naufrage, ont péri quelques sujets américains.

Le nouvel assassinat a été perpétré, d'après certains témoignages par un sous-marin qui, au moment où il a été aperçu par ses victimes, naviguait, sous pavillon allemand, pavillon qu'il aurait remplacé par les couleurs austrohongroises, dès qu'il eut constaté la nationalité italienne du navire qu'il allait attaquer. Peu importe cette circonstance, l'acte est là et l'Autriche pressentie par les Etats-Unis a répondu, dans une note reçue, le 18 novembre à Washington, que l'Ancona fut coulé d'une manière que les Etats-Unis avaient sommé l'Allemagne déconcerte le monde entier. Il est temps pour les gouvernements avant que tous les passagers eussent quitté le navire et elle allègue comme excuse le fait que les passagers avaient eu 45 minutes pour se sauver, et que ce temps aurait suffi s'il n'y avait pas eu de panique. Ajoutons que ce n'a pas été l'avis de M. Lansing qui a déclaré que le délai accordé ne constitue pas une excuse suffisante au torpillage qui a occasionné des pertes d'existences. Il faut donc compter avec l'imprévu et se dire que des attentats nouveaux peuvent se renouveler d'un jour à l'autre: il faut en conséquence, et coûte que coûte obtenir des garanties. Plus de paroles mais des actes, tel est le programme à adopter. Les faits sont là, qui parlent éloquemment: l'attitude de l'Allemagne déconcerte le monde entier. Il est temps pour les gouvernements des pays américains de se ressaisir et de prendre une détermination énergique basée sur autre chose que des arguments qui ne viendront jamais à bout d'un entêtement en apparence irréductible. Il est temps de ne plus faire étalage d'une longanimité qui n'a été récompensée que par le dédain de ceux qui en étaient l'objet.

Nous avons démontré qu'en fait de commerce international, de contrebande de guerre, et de blocus, le droit n'a pas réussi, par suite de circonstances qui ont été développées, à poser des règles immuables. Cela ne signifie pas qu'audessus du droit positif, il n'existe pas de principes qui tirent leur source des droits sacrés et intangibles de l'humanité. A ces droits aucune nation ne peut avoir la prétention de ne pas obéir, invoquerait-elle la nécessité militaire, comme le fait l'œuvre du grand Etat-Major général allemand, le Kriegsbrauch im Landkriege, herausgegeben vom grossen Generalstabe publié en 1902 (Usages de la guerre présentés par le grand Etat major général).

Il faut, à un peuple dont la tête rêve d'acquérir l'hégémonie mondiale par la force, opposer la barrière du respect des droits des nations. "Il est impossible écrit le général Bernhardi, dans la guerre d'aujourd'hui (Vom heutigen Kriege), d'améliorer à notre profit par des artifices diplomatiques la répartition de la surface terrestre telle qu'elle existe. Si nous voulons conquérir pour notre peuple la situation mondiale qui nous est due, il nous faut nous fier à notre épée." Le même auteur, il y a trois ans, annonçait l'approche de la guerre: "Malgré les paroles utopiques des apôtres de la paix et tous les beaux discours des hommes d'Etat, malgré les chaînes de papier par lesquelles la politique européenne essaie d'entraver les forces latentes de notre peuple, on entend approcher les pas de Dieu qui vont les déchirer comme des toiles d'araignée.”1

1 Revue de Paris, 1915, 15 mars, p. 289 (traduction).

Rien n'étonnera qu'une telle doctrine ait abouti à la violation des "chiffons de papier" signés par l'Allemagne.

L'heure est donc grave pour le Etats-Unis et pour toute l'Amérique, et les attentats commis sur son territoire contre les usines fabriquant le matériel de guerre, comme les attentats sur mer dont ont été victimes des citoyens américains, doivent les tenir en éveil et les inciter à prendre d'urgence les mesures nécessitées par la situation.

Nous nous sommes efforcés dans l'exposé impartial des faits et dans l'examen juridique des points contestés que l'Allemagne a soulevés de bannir tout esprit de parti. Nous avons scruté le passé, et regardé de face le présent: l'un et l'autre sont, pour les pacifistes un objet de profondes désillusions. Les faits sont là, indéniables dans leur évidente clarté. L'Allemagne en a implicitement reconnu l'exactitude en offrant, après dix longs mois de pourparlers, au lieu d'excuses et de désaveu que l'Amérique lui demandait de l'acte de ses préposés, une indemnité de 25,000 francs par tête pour les 115 citoyens américains brutalement engloutis dans l'Océan. Elle a même, nous le répétons à dessein, passé l'aveu de l'irrégularité de sa méthode, dans sa note du 28 février dernier, lorsque, sous les conditions qu'elle posait à l'Amérique, elle prenait l'engagement que ses sous-marins agiraient suivant les règles générales du droit des

gens."

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Et les choses en sont aujourd'hui à leur point de départ, et les craintes pour l'avenir ne sont pas hélas! dissipées.

Il faut cependant faire de colossaux efforts pour sortir de la profonde ornière où la diplomatie est enlisée. Le pacifisme peut y aider * * peutêtre! Toutefois il se bercerait d'un vain espoir si, à l'heure présente, il voulait entonner l'hymne de la paix. Des résolutions toutes récentes-elles datent des premiers jours de décembre-prises par l'Angleterre, la Belgique, la France, l'Italie, le Japon, la Russie, est sorti l'engagement solennel de mener la guerre jusqu'au bout, c'est-à-dire, dans leur pensée, jusqu'à l'écrasement du militarisme austro-allemand. Ces résolutions-là seront tenues, je crois, en dépit de toutes croisades pacifiques, d'où qu'elles viennent. Ce serait donc un leurre que d'escompter les effets possibles d'une médiation entre les belligérants. La voix est au canon: elle couvrira malheureusement la voix de la paix. C'est au moment critique, après l'affaire de Sarajevo, alors que l'orage se dessinait à l'horizon que la diplomatie aurait dû manœuvrer avec vigueur, de façon à détourner la tempête qui se disposait à balayer l'œuvre de 44 années de paix. Un arrangement était-il, à l'époque, du domaine de l'impossible? Ne pouvait-on pas recourir à l'arbitrage bienfaisant de la Cour de La Haye? Nous savons tous que, de la fin du 18° siècle jusqu'au commencement du vingtième, exactement de 1794 à 1900, sur une infinité de différends entre Etats, 180 cas out été amiablement solutionnés par arbitres. Nous avons tous présents à la mémoire l'affaire de l'Alabama; celles de la baie de Delagoa, du Phare, des pêcheries de Behring, pour ne citer que celles-là, qui ont été pacifiquement solutionnées par l'arbitrage international.

Et, plus près de nous, les Conférences de la Paix réunies à La Haye, en 1899 et en 1907, n'ont-elles pas créé une Cour permanente dont le rôle consiste précisément à éviter les chocs entre nations? N'a-t-elle pas, en 1902, rendu sa première sentence arbitrale au sujet du différend intervenu entre les EtatsUnis d'Amérique et les Etats-Unis mexicains, relativement aux fonds pieux des Californies? Ne s'est-elle pas prononcée, le 22 février 1904, sur des réclamations des puissances contre le Vénézuéla? N'a-t-elle pas, en 1905, aplani un différend existant entre le Japon d'une part et l'Allemagne, l'Angleterre et la France, d'autre part? N'a-t-elle pas solutionné une question pendante entre 68436-17-VOL VII- -19

l'Angleterre et la France à propos de l'indépendance du sultan de Mascate? N'a-t-elle pas enfin, en 1909, empêché l'Allemagne d'en venir aux mains avec la France, dans la retentissante affaire de Casablanca?

D'autre part, la commission internationale d'enquête réunie à Paris le 19 janvier 1905, sous la présidence de l'amiral Fournier, n'a-t-elle pas apporté une heureuse solution à l'incident de Hull qui avait failli mettre aux prises l'Angleterre et la Russie?

Voilà certes un beau tableau! Voilà, dans les jours rouges que nous vivons, un réconfortant souvenir pour les pacifistes dont l'action est, à l'heure actuelle, enrayée.

Que d'amers regrets n'éprouve-t-on pas à la pensée que la hideuse guerre européenne, avec ses deuils, ses cruautés, ses violations éhontées du droit, aurait été évitée par un appel à la sagesse de la Cour de La Haye! Et quelle plus belle inauguration aurait pu être faite de ce grandiose palais de La Haye, érigé par la munificence de l'illustre apôtre de la Paix !

Mais ni l'Allemagne, ni l'Autriche ne l'ont voulu et les neutres doivent assister impuissants à l'horrible carnage. Si, actuellement, leurs efforts dans le sens de la paix doivent rester vains, parce qu'une paix en ce moment ne serait qu'une trève, du moins doivent-ils exiger des belligérants le respect des droits de l'humanité.

Les droits de l'Amérique tout entière ont été outragés dans des conditions sur lesquelles nous avons suffisamment insisté. Elle a le droit et le devoir d'en réclamer la sauvegarde à l'encontre des procédés illégaux et déloyaux qui y ont porté ou qui y porteront atteinte.

Les gouvernements de tous les pays américains, entre les mains de qui tous les citoyens américains ont placé la sauvegarde de leur vie, ne doivent pas tergiverser. Ils doivent se rendre compte que la coupe est près de déborder et que les peuples américains en ont assez des procédés d'intimidation et des crimes commis contre les leurs.

Le moment est venu de prendre des mesures et d'exiger de l'Allemagne le désaveu des procédés de la guerre sous-marine entreprise contre les neutres. Il faut les prendre sans morgue, mais sans faiblesse. A la force qui viole le droit, il faut opposer une force qui le respecte et le fasse surtout respecter.

Il faut contraindre l'Allemagne à reconnaître que le droit permanent des neutres à la sécurité de la navigation en haute mer, prime le droit passager des belligérants à l'emploi de la haute mer comme théâtre des opérations de guerre.

Que notre maxime soit: "Tout pour le droit, Tout par le droit!" Il faut, § tout prix, obtenir ce que nous demandons: le respect de la vie de tous les sujets Américains en mer! Ce faisant et laissant au tribunal arbitral de La Haye, plus tard, après la guerre, le soin de fixer les indemnités dues aux innocentes victimes des criminels attentats commis sur mer, les gouvernements auront fait leur devoir, tout leur devoir et mériteront l'approbation de tous les citoyens de la Grande et Libre Amérique, et de l'humanité tout entière!

Thereupon, at 12.15 o'clock, the session adjourned.

JOINT SESSION OF SUBSECTION 1 OF SECTION VI, THE AMERICAN SOCIETY OF INTERNATIONAL LAW AND THE AMERICAN INSTITUTE OF INTERNATIONAL LAW. SHOREHAM HOTEL,

Thursday afternoon, December 30, 1915.

Chairman, CHARLES NOBLE GREGORY.

The session was called to order at 2 o'clock by the chairman.
Papers presented:

Should international law be codified? And if so, should it be done through governmental agencies or by private scientific societies? Papers by Simeon E. Baldwin, Arthur K. Kuhn, and Elihu Root. The unification of international law in the American Continent, by Victor Maurtua, of Peru.

The CHAIRMAN. Ladies and gentlemen, the first topic of our consideration is one of the profoundest interest to the whole world at the present time, "Should international law be codified? And if so, should it be done through governmental agencies or by private scientific societies?" As the first speaker upon that topic I have the pleasure of calling upon a gentleman who has served as the president of the American Bar Association, as the president, substantially, of every learned society in America, and of almost every learned society in Europe, always with the highest distinction and faithfulness-a gentleman who has, moreover, been the chief justice of his good State, Connecticut, and its governor, and who is a constant contributor to the best thought of the world on international law. I have the honor and pleasure to call upon Gov. Simeon E. Baldwin.

AND IF SO,

SHOULD INTERNATIONAL LAW BE CODIFIED?
SHOULD IT BE DONE THROUGH GOVERNMENTAL AGENCIES
OR BY PRIVATE SCIENTIFIC SOCIETIES?

By SIMEON E. BALDWIN,

Formerly Chief Justice of the Supreme Court of Errors of Connecticut and President of the International Law Association.

Mr. Chairman, ladies, and gentlemen: In arranging the program for this meeting and treating the subject which has been stated by the chairman, it was not thought best to refer to the doings of the First Pan American Scientific Congress at Santiago or of the various American international conferences

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